Mes errances ont commencé un soir d'hiver au Louvre.

 Nous étions en 2009, je me baladais avec une amie et j'ai voulu tester une technique sur Photoshop. J'ai pris 100 photos d'elle qui marchait vers moi en sautant dans les flaques. En rentrant chez moi, j'ai tout de suite téléchargé ces images et ai réalisé ma première Errance. J'ai été intriguée par cette silhouette floue, presque imperceptible qui avançait vers moi .  J'ai continué mes études, ai mis de côté cette technique que j'avais inventée et ai commencé à travailler sur les jeunes migrants mineurs qui arrivaient en France perdus, seuls et affamés.Au fil de mes rencontres, j’ai réalisé que pour aborder au mieux cette approche dans mon travail artistique, il me fallait travailler à la fois sur la question de l’identité et sur  celle de l’errance. De l’identité, car chaque exilé que je rencontrais avait une personnalité qui lui était propre et qu’en arrivant en Europe il était réduit à un groupe. Les gens ne voyaient plus la personne, mais l’exilé. Déshumanisé sans papier, sans un statut le reconnaissant comme réfugié, il ne lui reste plus qu’à attendre, à errer sans fin. 

Cette question de l’identité individuelle anéantie au profit d’une gestion collective des masses arrivantes m’a beaucoup intéressée et m’a poussée à réfléchir à la façon de mettre cet aspect particulier en avant dans mon travail. Je me suis particulièrement penchée sur l’utilisation de mon médium habituel ; la photographie et ses multiples variations. La question du flou, de sa représentation et de sa signification s’est tout de suite présentée à moi à travers le procédé d’accumulation photographique que j’avais mis en place, un soir d'hiver au Louvre.

Afin de réaliser ces images, j'ai volontairement suivi de parfaits inconnus dans la rue. Des adolescents venus en France pour survivre et condamnés à marcher dans Paris en attendant d'être reconnus, aidés ou simplement accompagnés.

À travers ce travail j'ai tenté de me joindre à leur errance pour une courte durée. J’immortalise un moment anodin de leur vie. Un moment inintéressant qui représente pourtant l’essentiel de leur parcours : l’errance. 

Tout en continuant mon travail sur les jeunes migrants isolés, il m’a semblé nécessaire de travailler sur une série plus personnelle, se rapportant à mes égarements et à mes errances.

J’ai toujours beaucoup voyagé. Eu besoin de découvrir sans cesse de nouvelles cultures, de proposer à mon esprit un moment de répit loin de son quotidien. Les habitudes et les rythmes m’étouffent et lorsque cela m’arrive mon esprit s’évade, s’accrochent à un détail qui se présente à lui et a du mal à la lâcher. Je réalise donc des reproductions abstraites de paysages ou d’instants issus de ma vie.Tout comme pour mon esprit il n’y a pas de règle. Ces images sont réalisées lorsque je suis en déplacement, loin de chez moi, seule ou avec mes proches.

À travers cette série photographique, j’invite le spectateur à voyager avec moi .